Apre,rude, brutal, splendide, majestueux. Comme la nature. Comme l'humain. Parfois.
Travis , 17 ans, découvre un champ de
cannabis en allant pêcher la truite. A partir de là, sa vie bascule…
Il rencontrera Leonard, ex-prof reconverti en dealer,
qui le prendra sous son aile et l'accueillera dans son vieux mobil-home lorsqu’il partira de chez lui, incompris par son
père. Il croisera la route de Toomey et son fils Hubert, producteurs de marijuana et revendeurs de pilules, macs à leurs heures,
crapules sans scrupules…
C’est
un monde d’hommes dont il est question, comme souvent dans les romans de Tony
Hillerman et de Russel Bank... Et Ron Rash fait
partie de cette littérature, celle qui embrase la nature sauvage, les grands
espaces. Il y est question de pick-up, de winchesters, de pièges à ours, de
pack de bières, de tabac…
Les femmes y sont impuissantes : Dena
prend des râclées, se prostitue, avale des quaaludes par poignées ; Lori
amoureuse de Travis, tente de se construire une vie rangée et de dicter sa
bonne conduite. Deux figures de femme dont on peut regretter la pâleur...
Travis pêche et observe la nature dont la splendeur vient se confronter à la noirceur des hommes.
« Il s’arrêta dans les eaux d’aval. Dans les remous du plan d’eau des feuilles jaune et rouge tendaient une mince courtepointe à la surface du ruisseau. » p129
Tout au long du roman,il imagine la truite trop petite qu’il a
relâchée dans la rivière, et ainsi, parle de lui, adolescent naviguant en eau trouble et tentant de redresser le monde dans lequel il évolue.
« L’eau, un lieu sombre et calme devenant plus sombre et plus calme encore tandis qu’une coiffe de glace venait recouvrir le bassin, isolant la truite du reste du monde. Un lieu sombre et silencieux, Travis le savait, et la truite là-bas au fond, le métabolisme au ralenti, aussi proche de l’hibernation que pouvait l’être un poisson. » p145
Entre deux eaux, entre deux mondes, entre deux époques :
celle du massacre de Shelton Laurel lors de la guerre de Sécession qui
ressurgit au travers d’un journal et d’une paire de lunettes.
A la fin de l’hiver, l’homme qu’est devenu Travis, aura choisi sa vie.
« Travis imagina la truite mouchetée sous la glace, montant dans ses rêves gober à la surface des éphémères jaune vif, rêvant du printemps en attendant patiemment que passe l’hiver . » p145
Ce n’est pas vraiment un roman d’apprentissage :
il ne se déroule que sur quelques mois, mais il y est tout de même question de
la confrontation au monde, du choix, de l’influence du passé historique et
familial.
Roman très bien écrit où la poésie affleure
sans jamais ralentir le récit qui monte jusqu’à l’apogée finale que l’on
présent violente.
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