Comment résiste-t-on à l’apprentissage de la lecture ?
Comment peut-on décoder, comprendre et intégrer le mécanisme de la lecture et
même accéder au sens, sans lire pour autant ? Comment peut-on prendre la
lecture comme lieu de résistance et d’opposition ?
C’est ce qu’Agnès Desarthe tente d’analyser pour
elle-même : éclaircir cette ombre
qui occultait tous les livres de son enfance jusqu’à cette année d’hypokhâgne
où une prof de philo va ouvrir une petite porte d’accès.
Evidemment ce livre fait particulièrement écho et je rejoins cette analyse: la résistance à la lecture est à l'oeuvre de bien des façons...Et l'approche analytique n'est pas le biais le moins intéressant loin de là! Apprendre à lire c'est grandir...lire c'est s'échapper...
Agnès Desarthe est écrivain et traductrice et c’est
également par ce détour qu’elle nous convie à voir la lecture et l’écriture. Pour traduire un roman, il faut s’abstraire, se rendre
vacant et cette vacuité nous fait accéder à l’écrit de l’autre. Agnès Desarthe évoque la traduction d’un roman de Virginia Woolf « La chambre
de Jacob », concernant un passage où V.W. répétait quatre fois en trois
lignes le mot « feuille ». Que faire de cette répétition ? Se
plonger dans un dictionnaire de synonymes ? Interpréter? Parce qu'elle connait parfaitement le monde, l'imaginaire, l'état d'esprit, de V.W, elle produit un texte en français en laissant l'auteur initiale entrer dans sa langue maternelle et pénétrer ainsi sa propre écriture.
Ainsi, Agnès Desarthe cite Lily Briscoe, personnage de "La promenade au phare":
"Oui, songea-t-elle, reposant son pinceau, au comble de l'épuisement, j'ai eu ma vision."
Et A.D poursuit:
Et pour lire, ne faut-il pas une certaine "vacance"?...accepter de se laisser entraîner dans un univers qui n'est pas le sien...se laisser happer...
Ainsi, Agnès Desarthe cite Lily Briscoe, personnage de "La promenade au phare":
"Oui, songea-t-elle, reposant son pinceau, au comble de l'épuisement, j'ai eu ma vision."
Et A.D poursuit:
"Il est difficile de ne pas entendre la voix de Virginia Woolf derrière ce constat final: "J'ai eu ma vision.", c'est ce que l'écrivain-voyant qu'elle était se disait à chaque livre terminé, car elle procédait ainsi par révélations, par chocs visuels. J'ai donc décidé, afin de résoudre cette affaire de feuilles pléthoriques, d'oublier la phrase pour me tourner vers l'image, le tableau qui l'avait fait naître."Quel joli lien avec Rimbaud!
Et pour lire, ne faut-il pas une certaine "vacance"?...accepter de se laisser entraîner dans un univers qui n'est pas le sien...se laisser happer...
Quant à l'écriture:
Ouh... de quoi méditer!
"Ecrire n'est pas un choix, c'est une nécessité, mais cela n'a jamais aidé personne à vivre, et surtout pas l'auteur lui-même."
Ouh... de quoi méditer!