Albert Chassaing, ouvrier chez Michelin, vit dans un village
Auvergnat avec sa vieille mère, sa femme Suzanne et leur fils cadet Gilles.
Leur aîné Henri est en Algérie. Nous sommes en 1961. Le 9 juillet. Le jour où
la télévision doit être livrée dans la vieille ferme. Unité de lieu, unité de
temps : un drame va se jouer.
Suzanne tente d’introduire un peu de la modernité de
l’époque : la cuisine en formica, la machine à laver ; tout en
arborant ses mises en plis et tallons aiguilles. Elle a noué un lien
particulier avec Henri, qui n’a connu son père qu’à la fin de la guerre de 39. Pendant
que Suzanne élevait seule leur enfant, Albert se battait au fort de la ligne
Maginot. Il fait partie de ces soldats qui n’ont rien dit de leur guerre,
perdue si vite, en proie aux railleries et vite effacés par les souffrances
innommables des revenus des camps, et les faits de bravoure des résistants. Et
c’est là que le drame prend sa source. Albert est un taiseux, à côté de la vie,
à côté de la famille. Le chagrin, la peine, qui éclot en ce jour de juillet, va
ouvrir les vannes des larmes, à l’insu de ceux qu’il aime, et va le conduire à
se sacrifier pour que l’aîné revienne à Suzanne …
Ce drame se déroule sur une journée, celle où la télé arrive
dans la maison avec les premières images de soldats d’Algérie, celle où le
facteur prend un bain dans la rivière, celle où Gilles lit « Emilie
Grandet » avec l’avidité des grands lecteurs, celle où Suzanne prépare un
repas de famille pour sa belle-sœur et son beau-frère communistes et citadins,
celle où Albert va se trouvé obligé de faire la toilette à sa mère impotente…
C’est un roman tout en finesse, ancré (encré ?!!!!)
dans les années soixante que nous avons peu l’habitude de lire sous cet
aspect : l’arrivée du progrès, le silence des anciens soldats, les traces
indélébiles des guerres. De toutes les guerres. Car elles sont toutes immondes,
surtout celles qui sont tues.
La nouvelle qui suit « L’imaginot ou essai sur un rêve
en béton armé » poursuit en quelque sorte le roman puisque nous y
retrouvons Gilles, et apporte des précisions sur ce qu’était ce fort Maginot
méconnu et pour cause…
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